Discours de Monsieur Rémy REBEYROTTE,
Maire d'Autun, Vice-Président du Conseil Général
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Monsieur le Sous-Préfet,
Monsieur le Député,
Mesdames et Messieurs les Elus de la République,
Mon Général,
Mon Colonel, Mon Capitaine, …
Messieurs les Officiers et Sous-Officiers,
Monsieur le Président du Comité d'Entente,
Messieurs les Présidents d'Associations du Monde Combattant,
Mesdames et Messieurs les représentants de l'Etat, des corps constitués, des administrations et des Autorités civiles, militaires, religieuses et éducatives,
Mesdames, Messieurs,
Merci d’être encore une fois venus si nombreux pour commémorer la Libération d’Autun et de l’Autunois. Merci également à tous ceux qui ont contribué à l’organisation de cette cérémonie.
Comme vous le savez, la bataille de trois jours qui a conduit à la Libération d’Autun a marqué l’histoire de la seconde guerre mondiale puisqu’elle a permis la jonction entre les armées américaines venues de Normandie et l’armée française de Lattre de Tassigny, débarquée de Provence. C’était le 12 septembre 1944.
Aujourd’hui, soixante-quatre ans plus tard, nous sommes donc réunis pour rendre hommage à celles et ceux qui ont résisté, au péril de leur vie, à l’occupant, au nazisme, qui ont libéré la France et particulièrement l’Autunois.
A ceux qui sont présents aujourd’hui, représentant les Anciens Combattants du 2ème Dragons, de la 1ère Division Française Libre, du Corps Francs Pommiès, du Régiment Valmy et des maquis locaux. Avec cette année un hommage particulier au Maquis Serge dont le fanion rejoint aujourd’hui la galerie des drapeaux de notre Hôtel de Ville comme un témoignage supplémentaire d’un temps que nous ne devons jamais oublier. Je tiens à cette occasion à saluer chaleureusement le représentant de ce maquis qui a contribué à notre Libération, Monsieur Saquet, présent aujourd’hui.
Ayons également une pensée pour ceux qui ne peuvent malheureusement pas être des nôtres aujourd’hui, mais sont présents dans nos cœurs et dans nos têtes ; pour tous ceux que les ennuis de santé ont éloignés de nous momentanément, mais aussi pour ceux qui nous ont quittés cette année, Jean Guillemin, ancien du Maquis Valmy, et le Colonel Lucien Nectoux, auquel je souhaite rendre un hommage particulier ; une pensée aussi pour Clovis et Moïse du Corps Francs Pommiès, décédés il y a cinq ans au retour de nos cérémonies.
Hommage au Colonel Nectoux.
Enfin, une pensée pour tous ceux qui ont payé de leur vie leur amour de la Liberté. Qui ont résisté pendant l’Occupation. Qui se sont battus lors de la Bataille d’Autun qui fit plus de 100 morts et des dizaines de blessés. Ils sont la fierté de notre territoire et la fierté de notre pays.
Car tous les spécialistes de la seconde guerre mondiale s’accordent sur ce point : l’Autunois-Morvan, avec plus d’une vingtaine de maquis en 1944, a constitué l’une des grandes zones françaises de résistance au nazisme.
Est-ce l’effet de la géographie de notre territoire, son relief tourmenté et ses forets séculaires, qui ont dérouté les troupes de l’ennemi ?
Est-ce la rudesse des conditions de vie morvandelles d’alors, qui a préparé ses habitants aux conditions extrêmes de la clandestinité du combattant ?
Peu importe…
Au final, il s’est développé dans notre région un esprit particulier : l’esprit de la Résistance. Résistance devant le nazisme, contraire à nos valeurs de justice et à nos idéaux de Liberté, d’Egalité et de Fraternité.
Ces trois mots constituent la devise de la République. Ils étaient également celle de tous nos combattants :
La Liberté, Liberté chérie, pour laquelle ces hommes et ces femmes se sont tant battus.
L’Egalité : car il n’est plus question de classe sociale lorsque l’on est face au danger et à la mort.
La Fraternité, dans l’Armée, au sein des Corps Francs, dans les maquis ou dans les camps, au-delà de toute appartenance, de toute convention sociale, raciale ou religieuse.
La Liberté comme moteur et objectif, l’Egalité et la Fraternité comme moyen possible pour mener le combat collectif de la Liberté. Les trois sont intimement liés.
Qu’en est-il aujourd’hui ?
De nos jours, le spectre du nazisme ne semble heureusement plus d’actualité. Autour de la France et de l’Allemagne, l’Europe a pansé ses blessures et s’est unifiée. Petit à petit, la guerre s’éloigne de nos frontières…
Ce constat signifierait-il qu’il n’est plus de combats à mener ? Que cet esprit de résistance que j’évoquais tout à l’heure est à ranger au grenier de nos souvenirs ? Que, définitivement, nous serions à l’abri d’un dramatique retour en arrière ?
Bien sûr que non. Et c’est pourquoi il est si important de nous réunir lors de ces célébrations commémoratives, d’enseigner à la jeunesse l’Histoire de notre pays, d’entretenir le devoir de mémoire.
C’est pourquoi il est nécessaire de toujours rester vigilant face aux menaces nouvelles à l’encontre de la Liberté. Ces menaces existent. Et même si nous n’avons plus à prendre les armes pour les repousser, les forces qui tentent de les imposer ne sont pas moins déterminées à gagner le combat.
Un combat qui doit se jouer sur le terrain des valeurs et de l’engagement : refuser le fichage des individus dès l’age de 13 ans sous prétexte de leur engagement ou des risques supposés qu’ils représenteraient, en fonction de leur origine, de leur fréquentation, de leur religion ou de leur vie sexuelle.
C’est un honneur aujourd’hui que de s’opposer au décret de juillet dernier, instituant le fichier si joliment dénommé Edvige mais qui rappelle à notre souvenir le danger que peuvent constituer des listes de noms lorsqu’elles tombent dans de mauvaises mains…
Je pense aussi à la traque des sans-papiers qui, sous couvert de la nécessité de réguler les flux migratoires, donne, chaque jour davantage, le vrai visage de l’inquiétant Ministère de l’identité nationale.
Je pense enfin aux risques pesant, de plus en plus, jour après jour, sur l’indépendance de notre justice ou la liberté de nos médias.
Est-ce dans ce monde que nous voulons vivre ? Nos enfants, nos petits-enfants méritent-ils cela ? Rappelons-nous le combat de ceux qui se sont battus pour la Liberté. Le meilleur hommage que nous pouvons leur rendre est de la préserver, voire de la conforter.
Non, la Liberté ne doit jamais être considérée comme acquise ad vitam aeternam. Elle est une chose fragile qui doit être défendue.
Elle doit être défendue au niveau individuel comme au niveau international car, là aussi, la direction prise actuellement par notre pays est un reniement de notre histoire collective.
Au sortir de la guerre et sous la Vème République, Charles de Gaulle avait fait de l’indépendance de la France une priorité de notre politique nationale : pas d’alignement sur une quelconque autre puissance, fut-ce-t-elle amie ; d’où le refus d’adhérer aux alliances systématiques à travers le commandement intégré de l’Otan ; d’où l’affirmation de l’indépendance nationale à travers une armée à hauteur des ambitions de la Nation ; d’où une diplomatie non alignée permettant à la France de jouer son rôle au service des peuples et de leurs droits inaliénables. Ces positions fortes ont été partagées par les successeurs du Général de Gaulle bien au delà des alternances politiques.
Aujourd’hui, cette orientation est remise en question : la France souhaite rejoindre le commandement intégré de l’Otan et a choisi l’alignement comme principe politique, d’où le changement de nature de notre engagement en Afghanistan, avec de rudes conséquences pour notre armée et ses jeunes recrues. Ayons ce matin une pensée pour ces dix jeunes soldats morts au service de la France.
De la même manière, notre diplomatie perd jour après jour de son originalité, comme le montre la crise au Caucase.
Alors rupture, point d’interrogation ? Attention de ne pas rompre nos valeurs : la Liberté, y compris la liberté d’action ; l’Egalité des citoyens mais aussi celle des peuples ; la Fraternité entre Français mais aussi entre Européens et avec l’ensemble des peuples libres et ceux qui combattent pour la Liberté.
Ce sont les valeurs de notre démocratie et de notre République, unie et indépendante ; ce sont les valeurs de notre Etat de droit, celui-là même pour lequel un demi million de Français ont péri entre 1939 et 1945, hommes et femmes auxquels nous rendons hommage ensemble et réunis ce matin.
Pour préparer le 65ème anniversaire en septembre 2009, nous aurons besoin de la contribution de tous afin de donner à cet événement une dimension pédagogique de premier ordre.
Merci de votre attention.